Quand les chants et les tatouages des femmes amazighes inspirent les artistes…

Les femmes amazighes portent les traces de l’histoire ancestrale sur leurs visages tatoués. Elles vivent dans les hauteurs, sur les cimes, en osmose avec la nature. Un univers très inspirant. Le tatouage, cette espèce d’écriture sur le visage, le corps… interpelle, interroge, fascine et fait plaisir aux yeux.

Ce n’est pas uniquement pour se faire belles que les femmes amazighes impriment des tatouages sur leurs visages. C’est surtout pour extérioriser leur attachement à la terre, à la tribu et aux valeurs de leur peuple. Il faut dire que plusieurs artistes photographes ont fait des femmes amazighes un thème de travail. Ils ont abordé avec une touche artistique, esthétique et photographique les œuvres artistiques qu’elles portent sur leurs corps. Question de conserver une mémoire en voie de disparition et en proie à l’oubli.

Les amateurs de la photographie se souviennent certainement de la superbe exposition intitulée «Les Berbères au Maroc, une culture en résistance» qui s’est tenue lors du festival annuel de photojournalisme Visa pour l’image à Perpignan dans le sud de la France organisé par le photographe algérien Ferhat Bouda. Cet artiste a travaillé sur les Amazighs du Haut-Atlas. Il a réalisé une série de photographies sur les Amazighes du Nord de l’Afrique. Ferhat Bouda a consacré sept ans de sa carrière à la recherche des Amazighes en Afrique, notamment en Tunisie, Égypte, Burkina Faso, Mauritanie. Son périple l’a conduit au Maroc, dans l’Atlas pour y rencontrer les communautés amazighes. La démarche artistique du photographe consiste à puiser dans cette culture authentique et à la faire découvrir au monde.

Pour ce faire, il a sillonné les villages de Tinfgam ou Timetda. Il s’est déplacé chez les nomades, partageant leur vie d’une grotte à une autre, à la quête d’une culture à la fois originelle et millénaire. La femme amazighe est au cœur de ses photographies, voire l’âme de ses recherches. Le choix n’est pas fortuit ! Car la femme est un pilier majeur dans la culture amazighe. Elle est omniprésente dans toutes les activités de la tribu, de la société.  Une photographie immortalise non seulement un moment, une situation, un témoignage, mais se veut un moyen pour conserver toute une culture de l’oubli. Une culture porteuse de valeurs humaines et universelles. «Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va», disait Antonio Gramsci.

La jeune photographe Yumna Al-Arashi, née à Washington, est partie, quant à elle, à la rencontre des femmes portant des tatouages. C’est sa grand-mère yéménite tatouée qui l’a inspirée pour entamer un périple afin de décortiquer ce côté caché du tatouage. La photographe a commencé depuis 2015 à fouiller dans les archives de Londres pour avoir une idée sur les tatouages. Par la suite, elle a sillonné le Maroc, la Tunisie et l’Algérie. Fascinée par le tatouage, elle a découvert suite à sa rencontre avec ces femmes amazighes les formes, les signes et le sens de chaque tatouage. Yumna Al-Arashi prépare actuellement un livre sur les femmes amazighes tatouées marocaines, tunisiennes et algériennes, dans leurs diversités et particularités.

Christine Dumont, quant à elle, a consacré un livre aux femmes amazighes. «Les femmes amazighes, Chants et gestes de travail des femmes» est l’intitulé de son beau livre. Des photographies y illustrent le quotidien des femmes du Haut-Atlas. Christine Dumont-Léger est une femme de la terre. Elle est allée à la rencontre des femmes amazighes du Haut Atlas marocain. Son long périple a débouché sur un beau livre mettant en valeur ces femmes. «Ce sont des femmes poètes au quotidien. Je ne suis intéressée ni par le rituel ni par les cérémonies. Je les observe tout simplement quand elles chantent. Ces femmes respirent la poésie, elles inspirent la poésie parce qu’elles sont habitées par tout ce qu’elles font et sont reliées avec la nature. J’ai étudié dans les milieux ruraux, j’ai étudié les peuples éleveurs et cultivateurs… Ce sont des peuples très proches de la nature. Et c’est ça qui fait d’eux une population sensible et harmonieuse. Elles sont entières», nous a-t-elle confié dans une interview lors de la 37e édition du Livre Paris.

Mohamed Nait Youssef

Related posts

Top