Le Maroc commémore ce jeudi 10 octobre, la journée nationale de la femme. L’occasion de mettre en avant les avancées et les défis concernant le statut de la femme marocaine, au cours des deux dernières décennies.
En 20 ans, le Maroc a initié plusieurs réformes majeures, notamment la Moudawana, le Code de la nationalité, la scolarisation des filles, l’accès des femmes aux postes de décision, l’adoption de l’approche genre dans tous les domaines et le programme de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Toutefois, l’égalité homme-femme fait encore débat aujourd’hui.
Pour Aicha Lablaq, membre du Bureau Politique du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) et députée, si le Maroc enregistre des acquis en matière des droits de la femme, plusieurs obstacles persistent. Entre autres, estime-t-elle, la question de l’égalité homme-femme et la promotion des droits des femmes ne figurent pas en tant que priorité dans l’agenda gouvernemental. Ce qui freine l’essor de la protection des droits des femmes marocaines. De même, elle pointe du doigt le manque d’harmonisation entre les conventions internationales et la législation nationale en ce qui concerne les droits des femmes, estimant qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire. Puisqu’aujourd’hui, explique-t-elle, «il existe encore beaucoup de défis à différents niveaux, notamment en matière des droits économiques et sociaux de la femme. Etant donné qu’à l’heure actuelle, on assiste à la féminisation de la pauvreté».
De l’avis d’Aicha Lablaq, le Maroc fait face à plusieurs reculs en matière de promotion des droits de la femme. Car pour elle, «quand les avancées sont lentes et prennent beaucoup de temps, on recule plutôt», insiste-t-elle. Ainsi, elle pointe du doigt le retard dans la mise en place de l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination (APALD), malgré l’existence de la loi n°79-14 adoptée en 2017. Une institution, qui n’a toujours pas vu le jour et qui devrait normalement consacrer et faire valoir les valeurs de l’équité, de la parité et de la non discrimination au Maroc.
S’il y’a une question qui est revenue récemment sur le devant de la scène, en matière des droits de la femme, c’est le sujet des libertés individuelles, notamment la question de l’avortement. Pour la parlementaire, si le projet de loi 10.16 modifiant et complétant le Code pénal a apporté de nouvelles dispositions positives, avec entre autres l’introduction des peines alternatives, l’incrimination du harcèlement sexuel… il faudrait saisir l’occasion de l’amendement en cours pour ouvrir le débat et être à l’écoute des citoyens, surtout avec la récente affaire de la journaliste Hajar Raissouni. «Il n’ya pas de démocratisation de l’Etat sans promotion des droits de l’Homme et l’acceptation du droit à la différence. La démocratie ce n’est pas une question de majorité, mais de valeurs et de droits», indique-t-elle.
Si le Maroc souhaite avancer en matière de promotion des droits des femmes, Aicha Lablaq estime qu’il faudra une forte mobilisation des forces progressistes, ainsi qu’à l’intérieur des institutions. «Il va falloir faire pression. C’est une question de rapports de force, car il y a des acteurs qui n’ont pas la même vision que nous», conclut-elle.
Danielle Engolo