L’assassinat d’Abdelkrim Benabdallah, le combattant exceptionnel

Il y a 69 ans, à l’aube de l’indépendance …

Mohamed Khalil

Il y a 69 ans, le 31 mars 1956, le grand intellectuel et dirigeant révolutionnaire du Parti communiste marocain Abdelkrim Benabdallah était lâchement assassiné par les milices de la Mounadama Assirya – l’Organisation clandestine- animée par des tueurs à gage à la solde de certains dirigeants dits révolutionnaires du parti de l’Istiqlal de l’époque. Le défunt était doublement visé en tant que dirigeant communiste de premier plan, refusant la compromission et en tant que chef politique du glorieux Croissant noir, fer de lance de la résistance marocaine contre le colonialisme. Depuis, feue son épouse, Suzanne Larribère, et ses enfants, Mourad et Assia, mais également la famille Larribère en Algérie, connue par sa générosité communiste, militante, humaine et populaire, ont pu faire le deuil, plus exactement il y a 20 années, quand Suzanne Benabdallah était venue à Casablanca lors de la célébration du 50 ème anniversaire du lâche assassinat de son époux.

Ingénieur géologue à l’époque, il avait été, en 1951, le premier Maghrébin à porter, haut et fort, la voix du Maroc et de l’appel à son indépendance au Congrès de Copenhague du mouvement mondial de la paix, au sein duquel il siégeait.

Abdelkrim, avec ses compagnons de l’époque, à l’instar d’Ali Yata, resté en exil forcé jusqu’en 1958, d’Abdeslam Bourquia, d’Abdallah Layachi, de Mohammed Setti et d’autres, était l’exemple du patriote conséquent, l’intellectuel de la révolution populaire contre la mainmise sur le Maroc. Ceux qui l’avaient connu ont gardé de lui un souvenir d’homme intègre, résolument engagé dans le combat patriotique et social contre le colonialisme.

Abdelkrim avait renoncé à son salaire professionnel de cadre au sein du ministère des mines pour mener le combat du Maroc pour son indépendance, contre un salaire de misère qu’assurait, bon an mal an, le Parti communiste marocain à ses «permanents» de l’époque.

Abdelkrim Benabdallah, en dirigeant politique et responsable du « Croissant noir », avec feus Abdallah Haddaoui et Abdallah Layachi, a mené un combat d’avant-garde contre le colonialisme, en organisant de multiples actions armées contre les colons et les traîtres à la Patrie. Il s’était également distingué par sa farouche opposition aux pseudo-résistants qui ne cherchaient que l’arrivée au pouvoir.

Son assassinat, le 31 mars 1956 à Casablanca, en bas de son domicile de la route de Médiouna, a été attribué, dès l’époque à « des éléments » de la «Monadama assirya» (l’organisation clandestine que dirigeait Mehdi Benbarka alors leader au sein du Parti de l’Istiqlal. Abdallah Layachi, dans des témoignages parus dans Al Bayane et la presse mais également devant l’Instance équité et réconciliation, venue accueillir sa version sur les atteintes et attaques entre les partis politiques, avait affirmé cette version.

Cette version a été confirmée, en 2006, par un historien du «Croissant noir», engagé aux côtés du frère de feu Abdallah Hadaoui, le chef en titre du Croissant Noir également assassiné à l’aube de l’indépendance du Maroc. L’historien avait passé 8 ans de recherche sur l’assassinat d’Abdallah Haddaoui, également liquidé, sur son chemin de retour de Rabat… vers Casablanca, par les sbires d’ «Al Mounadama assirya» à la solde de projets politiques fascisants.
Ssi Ahmed Benkirane, l’ex-président adjoint de la CGEM, ami et voisin (il habitait le boulevard de Suez, l’actuel boulevard Al Fida) du défunt Abdelkrim nous avait confirmé la haineuse compagne de tuerie qui avait suivi l’indépendance du Maroc.

«Moi-même, nous déclarait encore Ssi Ahmed Benkirane, j’avais été l’objet de tentatives d’assassinat de la part de ces milices, même si j’étais membre du Parti de l’Istiqlal. Mais on me reprochait ma sympathie avec les communistes et mon amitié avec Abdelkrim», nous avait-il déclaré. Lui, il aura la vie sauve, en tant que résistant istiqlalien et ami d’Abdelkrim, grâce à sa fuite vers Marrakech où il a vécu clandestinement chez ses oncles. En fait cela ressemblait plus à des opérations de liquidation des concurrents politiques crédibles…

Pour le Parti du progrès et du socialisme, continuateur des nobles traditions patriotiques, le martyr Abdelkrim Benabdallah est considéré comme « l’un des plus éminents militants communistes et l’un des patriotes les plus conséquents qui se sont battus contre le colonialisme pour l’indépendance et ont hissé la bannière revendiquant la justice sociale, entre le milieu des années quarante et le milieu des années cinquante du siècle dernier, avant d’être assassiné par trahison alors qu’il était dans la fleur de l’âge et à la l’apogée de son apport militant ».

Il s’était distingué, à Paris, par son combat en tant qu’étudiant dans les rangs de l’Union nationale des étudiants du Maroc, avec feus Abderrahim Bouabid, Eh Hadi Messouak et d’autres intellectuels marocains. Il est considéré par le parti et d’énormément de milieux progressistes comme un intellectuel organique auquel on lui reconnait également « un haut niveau d’abnégation et de sacrifice en matière de dévouement à ses idées, en faveur de l’indépendance de sa patrie, de la dignité humaine et de la victoire des intérêts suprêmes de la nation et du peuple ».

Près de 70 ans après, le Parti du Progrès et du Socialisme continuera à se rappeler des siens et à invoquer la mémoire de ce martyr et de ce combattant exceptionnel, ses valeurs militantes uniques.

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