Mohamed Nait Youssef
Une rentrée scolaire exceptionnelle en ces temps de pandémie. En effet, réussir cet événement phare de l’année est un pari à gagner notamment dans le contexte actuel. Or, et à l’instar des années précédentes, l’enseignement de la langue amazighe n’a pas connu de nouveautés.
A cette occasion, des associations, acteurs et activistes amazighs ont pointé du doit sur le recul «considérable» et l’état de santé de l’enseignement de l’amazigh dans l’école publique. Dernièrement, des voix associatives se sont levées pour dénoncer cette régression dans certaines académies et directions à Tiznit, Casablanca, Rabat. Ils ont appelé en outre à respecter les dispositions de l’article 5 de la Constitution.
Par ailleurs, la loi organique n°26.16 définissant le processus de mise en œuvre du caractère officiel de l’amazigh, ainsi que les modalités de son intégration dans l’enseignement et dans les domaines prioritaires de la vie publique a été publiée le 26 septembre 2019 au Bulletin officiel n°9314. Cette loi organique importante permettra à l’amazighe de remplir sa fonction de langue officielle.
«L’enseignement de l’amazigh dans l’école publique et privée est en régression. En effet, après avoir passé un an sur la publication de la loi organique de l’amazighe dans le Bulletin officiel, plusieurs académies et directions de l’éducation nationale, dans les quatre coins du pays, nous surprennent avec des décisions étranges qui ont touché le corps enseignant et l’emploi du temps de la langue amazighe», a souligné Arehmouch Ahmed, coordinateur de la Fédération Nationale des Associations Amazighes au Maroc «FNAA», dans une déclaration à Al Bayane. Ces décisions inexplicables, a-t-il ajouté, constituent une atteinte à l’amazighe et sa place dans l’école publique.
Selon lui toujours, les académies et directions concernées ne figurent pas dans leurs spécialités juridiques le changement des programmes scolaires et l’annulation de la spécialité de l’enseignement de la langue amazighe et de la remplacer par une autre langue.
En revanche, les académies ont pour mission de vieller à la mise en œuvre de la décision politique et non plus la créer, a-t-il fait savoir.
Et d’ajouter : «certaines académies ayant des enseignants de l’amazighe ont réduit les trois heures à une heure et demie ou une heure dans la semaine. Pis encore, on oblige parfois un certain nombre d’enseignants de l’amazighe de s’orienter vers une autre langue ou une autre matière».
Aujourd’hui, en ces temps précis, il parait que l’amazigh n’est pas une priorité pour le ministère de la tutelle, notamment en ce qui concerne la généralisation de cet enseignement, en lui assurant les moyens et les ressources humaines nécessaires.
«L’enseignement est l’un des domaines prioritaires de la vie publique exigeant la mise en œuvre de l’amazigh dans un délai de 5 ans. Or, aujourd’hui, il y a un manque de visibilité voire de vision claire du Ministère de l’éducation nationale pour promouvoir cette langue amazighe au niveau national, régional et local», a confié Abdellah Badou, président du réseau Amazigh pour la Citoyenneté (Azetta). Et d’ajouter : «le ministère de la tutelle est appelé à trouver une nouvelle stratégie pour la généralisation de l’enseignement amazigh sur l’ensemble du territoire national».
En outre, l’absence du manuel scolaire de l’amazigh du marché ainsi que l’insuffisance des mécanismes de l’accompagnement et du suivi du projet pédagogique amazigh. Toutefois, il y avait même ceux qui ont justifié ce recul de l’enseignement de l’amazighe au choix de la graphie de tifinagh qui a été considéré comme un faux débat pour des fins politiciennes ou idéologiques.
«Le débat sur le choix de la graphie tifinagh dans l’enseignement de l’amazigh est un faux débat visant à bloquer la promotion de cette langue et son rayonnement. Il faut rappeler dans ce cadre que l’Etat a tranché dans ce choix sachant que cette graphie est plus facile dans l’apprentissage pour les élèves et les étudiants», explique Abdellah Badou.