Le secteur des hydrocarbures est depuis quelques années en proie à tous les problèmes de gouvernance et de gestion.
De la libéralisation à la décompensation jugée aujourd’hui hâtive, en passant par la fermeture de la Samir, la seule raffinerie du pays et le désengagement de l’Etat de tout contrôle réel des prix et des marges, le secteur des produits pétroliers, considéré comme hautement stratégique, est aujourd’hui en mal de réforme et d’orientations.
Faut-il, aujourd’hui, revenir à la compensation ? Mohamed Chiguer, économiste et président du CERAB, estime que « oui, mais autrement ». L’Etat doit jouer le jeu, dit-il, et se doit de contrôler ce secteur stratégique de l’économie nationale. Il faut, dit-il, au moins plafonner les prix. C’est un secteur qui n’est pas concurrentiel et qui connait une entente flagrante sur les prix et donc, une concentration horizontale et verticale étant donné que le pays n’est pas producteur de pétrole.
Les prix de vente des produits pétroliers sont pratiquement au même niveau dans toutes les stations de services. Sans parler des autres produits vendus dans ces stations aux tarifs qu’ils veulent.
Le prix du gasoil a été augmenté depuis le 16 octobre. L’explication des professionnels n’est autre que la tendance haussière qui s’affiche au niveau du marché international du pétrole. Le litre du gasoil revient actuellement à plus de 10,90 dirhams dans certaines stations et celui de l’essence à 11,40 dirhams. Il faut rappeler que depuis le déclenchement du problème du niveau élevé des marges des distributeurs des produits pétroliers il y a quelques mois, le gouvernement s’est engagé à contrôler ces marges et les prix de vente et donc, éviter la dégradation continue du pouvoir d’achat du consommateur.
Le ministre des affaires générales et de la gouvernance avait aussi promis de mettre en place une application Mahatati qui permet un accès libre et rapide au prix réel du marché dans les différentes stations de services à travers le Royaume. Une application qui n’a toujours pas vu le jour…
Pour Chiguer, l’Etat doit intervenir et prendre ses responsabilités dans la gestion de ce secteur. Pour cela, il est nécessaire et indispensable, recommande-t-il, de faire fonctionner et faire revivre la Samir dans les meilleurs délais. Une forme rénovée de la compensation serait également une solution. La compensation dans sa version ancienne était une source de rente au profit de certains distributeurs. L’Etat doit aussi intervenir dans la fixation des prix de manière à plafonner les prix et les marges.
Le président du CERAB regrette le fait que les opérateurs du secteur font fonctionner la variation des prix à sens unique, celui à la hausse et restent rigides en cas de baisse des cours du brut au niveau du marché international. Et ce, même si l’achat ou l’approvisionnement se fait sur la base de contrat de six à huit mois.
Cette situation nous interpelle tous et confirme encore une fois que toute interférence entre le politique et l’économique aura des conséquences grave voire néfaste sur l’économie. L’Etat doit agir pour mieux gérer un secteur hautement stratégique et protéger le consommateur contre toutes les formes d’entente sur les prix ou même la qualité des produits commercialisés sur le marché local.
Fairouz El Mouden