«La culture n’est pas destinée à une élite»

Lucile Bernard, fondatrice du Centre de création artistique Riad Sahara Nour

Lucile Bernard est une romancière française venant installée à Marrakech. Elle y a fondé depuis des années le Centre de création artistique «Riad Sahara Nour» pour promouvoir la culture et l’échange entre les voix artistiques et culturelles des quatre continents. Détails.

Al Bayane : Qu’en est-il des échanges culturels et artistiques au Centre de Création Artistique Riad Sahara Nour? Quid de sa ligne éditoriale?

Lucile Bernard : Nous venons de terminer la saison septembre 2015-juin 2016. Ce fut une belle année riche en créativité partage, découvertes avec les intervenants, les stagiaires. Nous avons toujours quelque chose à apprendre les uns des autres dans ces rencontres, dans ce bouillon de culture où se croisent les sensibilités. A Sahara Nour, nous voulons conserver cette ligne d’ouverture, d’agitateur des idées, apprendre à vivre et à créer ensemble. La culture n’est pas destinée à une élite sinon c’est la mort de la culture, de sa finalité. Elle est destinée au plus grand nombre et il faut s’en donner les moyens. Pour la rentrée prochaine, nous avons déjà programmé une dizaine de stages : peinture, carnet de voyage, photographie, sophrologie, stage de création textile, danse orientale, ainsi qu’une résidence d’écriture avec des écrivains francophones résidant à l’étranger.

Vous êtes française installée dans la ville ocre depuis des années, et ayant contribué à la promotion du dialogue entre les cultures. Quel regard portez-vous sur l’action culturelle dans la ville de Marrakech?

Marrakech me fait l’effet d’une ville qui bouillonne, d’une ville en effervescence où le désir de s’exprimer, de créer, de rencontres, notamment chez les jeunes, a fait un saut spectaculaire depuis que je me suis installée ici en 2000 et je m’en réjouis. A mon arrivée, il n’y avait presque rien. Riad Sahara Nour a été le premier Centre de création artistique à Marrakech qui s‘est ouvert en proposant des stages, mais aussi des rencontres d’écrivains, café de la psychanalyse, rencontres internationales de la Poésie, concours de poésie destiné aux jeunes. Depuis, d’autres endroits se sont ouverts. Nous sommes heureux de constater que l’idée a fait son chemin, de cette ouverture à la culture avec tout ce qu’elle véhicule, une culture qui fait grandir l’humanité. Cependant, il est de notre devoir de rester vigilant, d’honorer l’exigence qui nous habite quant à la création en proposant des programmes de qualité et je répète en ouvrant au plus grand nombre les portes de la culture.  Nous sommes responsables de cet engagement, de ce processus de création, d’ouverture aux autres.

Avez-vous une programmation culturelle pour ce mois de Ramadan au centre artistique?

Pendant ce mois de ramadan, nous n’avons rien programmé. Nous reprendrons nos activités à la rentrée prochaine.

Nous avons entendu dire que votre roman sortira prochainement. Pouvez-vous en dire plus?

Ce roman, je viens de le terminer. Il ne sera, je pense visible, qu’en septembre. C’est un roman à mi-chemin entre mes deux précédents ouvrages «La vie comme un Poème» et «Dernières nouvelles avant le jour», qui tourne autour du thème de la culpabilité et de la rédemption par l’amour. Il est question de violence, de discrimination sociale, raciale, d’incompréhension, d’amour, de colère, de rage, de cette culpabilité d’une jeune ado des banlieues qui se sent coupable de la mort de sa mère, d’éveil aussi au corps, aux sens, à cette sexualité qui questionne et demande, de cette pureté du regard qui brûle, inaccessible aux biens pensants. «La vie, comme dit Lou, appartient aux cœurs purs ». Dans ce roman, il est question de Poésie, cette poésie qui sauve car cette jeune adolescente et poète avant tout, amoureuse de Rimbaud, de ses vers, ce livre qu’elle trimballe partout avec elle et qui est son oxygène. Lou qui écrit tout, «tout ce qui lui passe par la tête», pour vivre, pour oublier. Elle tient un journal pour tenir, s’évader avec le rêve, fuir l’insupportable, cette incompréhension, cette solitude qui arrache. Sa rencontre avec Arthur, un jeune étudiant en philosophie, va la submerger comme un torrent de lumière.

Mohamed Nait Youssef

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