Un éditorial de feu Ali Yata en mars 1973
Nous publions, ci contre un facsimilé d’un éditorial écrit par feu Ali Yata dans l’édition du 28 mars 1973 de l’hebdomadaire (à l’époque) Al Bayane. Bonne lecture.
Des communiqués du ministère de l’Intérieur ont été publiés, ces derniers jours, sur les actions armées intervenues en divers points du territoire ; au début du mois. Ils signalent la saisie de stocks d’armes et l’arrestation d’un certain nombre de responsables de l’UNFP dont des dirigeants nationaux bien connus. Mais alors que ces militants sont officiellement qualifiés de « criminels » et d’ores et déjà accusés d’atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat, la commission administrative nationale de l’UNFP a diffusé une déclaration, qui affirme, notamment, l’attachement de ce parti à la légalité.
En cet état de choses, et en attendant de plus larges informations et des précisions, nous ne pouvons, pour notre part, que nous élever contre la répression des progressistes et exiger le respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et des garanties judiciaires. Simultanément, nous nous dressons contre toute immixtion étrangère dans nos affaires intérieures et contre tout manquement au plein respect de notre souveraineté nationale.
Mais il ne saurait être question de s’arrêter à l’énoncé de ces positions de principe. Il faut savoir aller au cœur du problème, comme il faut avoir le courage de dire ou d’admettre la vérité, si amère et si pénible soit elle.
La dégradation de la situation que nous vivons, le mécontentement qu’elle crée au sein du peuple, la peur qu’elle inspire à certains milieux bourgeois, l’inquiétude qu’elle suscite parmi les résidents étrangers, les dangers auxquels elle expose la patrie, tout cela n’est ni fortuit ni imprévu. Ce n’est pas non plus le résultat d’une intervention extérieure. Cela vient expressément de chez nous et puise sa source dans une politique que nous ne cessons de dénoncer, qui n’émane pas de la volonté populaire et ne s’assujettit pas au contrôle populaire.
Cette politique a fait amplement la preuve de son impuissance à résoudre les problèmes fondamentaux, graves et redoutables du Maroc d’après l’indépendance. C’est elle qui est la cause profonde du malaise actuel, ces signes d’amertume, des manifestations d’impatience. Et c’est elle qu’il faut frapper, impitoyablement, et une fois pour toutes ! Pour promouvoir le renouveau, inséparable de la démocratie et du progrès social. Pour instaurer la confiance et assurer la stabilité. Pour préserver et renforcer l’unité nationale.
Pour nous, il n’est qu’une voie qui y mène, dans les circonstances présentes : c’est celle du rassemblement de toutes les forces nationales : révolutionnaires, progressistes et patriotiques, sur la base d’une stratégie nationale démocratique, établie en commun.
La division a été et demeure un non-sens. Mais aujourd’hui plus qu’hier, elle est impardonnable, parce qu’elle nuit, au plus haut point, aux intérêts de la patrie et du peuple.
Nous avons lancé, l’automne dernier, l’idée d’une table-ronde. Nous tenons cette initiative pour toujours valable et plus que jamais d’actualité. Et, une fois de plus, nous nous adressons à toutes les forces nationales anti-impérialistes et anti-réactionnaires, pour les appeler à cesser de s’entre-déchirer, à se rencontrer, à se faire des concessions réciproques, à s’entendre, à agir en commun. Pour le salut de la patrie et pour le bien du peuple !
ALI YATA